DJENNE PATRIMOINE

BP 07 DJENNE Mali

 

DJENNE PATRIMOINE Informations

numéro 2, janvier 1997

 

 

 

NOUVELLES DE DJENNE

La commune de Djenné, récemment créée en application des nouveaux textes sur la décentralisation, comprend, outre la ville de Djenné, les villages de Diabolo, Souala, Syn, Ballé, Kéra, Niala, Velingara, Kamaraga, Gomnikouboye et Yenleda : au total, environ 22.000 habitants. On lit notamment, dans la loi n° 95-034 portant code des collectivités locales du Mali, que le conseil communal délibère, entre autres sur la politique de création et de gestion des équipements collectifs notamment dans le domaine du sport, des arts et de la culture (art. 14).

Certains visiteurs de Djenné commencent à regretter très sérieusement que le temps du n'djé fisifisi soit révolu. Cet "homme du balai", bénévole, accomplissant cette fonction pour le ton (l'association villageoise) et en son nom, passait chaque matin dans les rues pour vérifier que chaque famille avait balayé devant sa porte. Aujourd'hui, Djenné est sale, et l'un de ses visiteurs, qui y a passé son enfance il y a quarante ans, nous a signalé son amère déception à cet égard, lors d'un récent voyage. Pourtant, à l'occasion du déplacement à Djenné de Madame l'Epouse du Président de la République (voir plus loin), les rues et places ont été nettoyées en trois ou quatre jours. Que Djenné apparaisse sale à ses visiteurs ne relève pas de la fatalité. On peut espérer que la municipalité qui sera prochainement élue fera en sorte que la cité veille à la fois à son hygiène et à se présenter aux visiteurs sous son meilleur jour.

NOUVELLES DU PATRIMOINE DE DJENNE

* L'Association pour le Développement de l'Islam à Djenné avait conçu ces derniers temps un projet d'aménagement de la mosquée ; il s'agissait notamment de poser des grilles aux portails et de carreler la salle de prière.

Les grilles ont été livrées et entreposées contre le mur Nord de la mosquée, où elles sont toujours. En effet, la population de Djenné, appuyée par la Mission culturelle, s'est opposée à la réalisation de ce projet. Toutefois, il semble que l'affaire ne soit pas définitivement terminée, et que diverses pressions s'exercent encore en faveur de ce projet.

* Une mission conjointe de la Banque Mondiale et du Getty Conservation Institute (organisme dépendant de la Fondation Paul Getty et spécialisé dans la protection et la réhabilitation du patrimoine) s'est rendue à Djenné au mois de juillet, pour préparer un programme d'investissement dans les sites maliens classés à l'inventaire du Patrimoine Mondial de l'UNESCO.

C'est dans ce programme que serait financé le musée de Djenné, le pavage des rues principales et l'aménagement des berges, mais peut-être aussi l'assainissement de la ville.

 

La carte de téléphone de 60 unités vendue au Mali par la SOTELMA représente la façade Nord de la Mosquée de Djenné : c'est une bonne idée !

 

* Une exposition "Djenné, ville du patrimoine mondial" a été installée début décembre dans les locaux de la Maison des Hôtes. Elle a été inaugurée le 16 décembre, en présence de Madame Adame BA KONARE, épouse du Président de la République, de Monsieur le Ministre de la Culture et de la Communication, de Monsieur le Ministre des zones arides et semi-arides, de Son Excellence l'Ambassadeur des Pays-Bas, de Monsieur le Professeur Roderick McIntosh, de Monsieur Rogier M. Bedaux, entre autres personnalités.

Dans cette exposition, on trouve essentiellement quelques documents photographiques tirés de l'exposition sur Djenné organisée par le Musée d'ethnographie de Leyde (exposition qu'on avait pu voir au Musée National de Bamako entre décembre 1995 et mai 1996), et d'autres présentant dans leurs grandes lignes les enjeux des fouilles scientifiques dans les couches archéologiques du sous-sol de Djenné et de ses environs.

Cette exposition est modeste, mais bien présentée ; elle attire largement les touristes visitant Djenné, et les habitants de la ville eux-mêmes, puisqu'elle a été visitée par 70 personnes chaque jour en moyenne pendant sa première semaine d'ouverture. Il faut cependant regretter que les panneaux concernant les enjeux de la recherche archéologique soient en anglais, alors que la population qu'il s'agit d'associer à la protection du patrimoine ne comprend déjà qu'avec difficulté le français !!!

* Le programme de réhabilitation des maisons constituant le patrimoine architectural de Djenné commence en janvier 1997. Sur les 168 maisons recensées, 7 seront restaurées la première année, et le projet est financé pour 7 ans. Sur place, cette opération est pilotée par un comité composé des personnalités suivantes :

- le Président du Comité local de développement,

- Monsieur Ba Asseye Maïga, chef de village,

- Almamy Korobara, imam de Djenné,

- le Président de la corporation des maçons,

- Monsieur Sébastien Diallo, architecte.

A Bamako, l'opération donnera lieu à la création d'une Fondation pour Djenné, et d'un bureau superviseur dans lequel seront représentés notamment le Ministère de la culture, la Mission culturelle de Djenné, l'Ambassade des Pays-Bas et le Musée National.

* Les opérations financées par le don du World Monument Fund ont commencé le 22 décembre. Par rapport au projet initial, les travaux de protection du site ont été redéfinis (diguettes pour freiner le ruissellement des eaux plutôt que comblement des griffes et ravines), et l'idée d'un musée de site est -fort heureusement- abandonnée. La campagne de fouilles durera en principe deux mois, et les objets méritant d'être exposés le seront dans une salle qui doit être aménagée dans les bâtiments de la Mission Culturelle.

Les Professeurs Roderick McIntosh et Susan McIntosh (Rice University, Etats-Unis) sont sur le site ainsi que Monsieur Tereba Togola (Institut des Sciences Humaines, Bamako).

* La revue culturelle TAPAMA, dont le premier numéro vient d'être publié à Bamako par les éditions Donniya (Cité du Niger, BP 1273, Bamako, Mali, tél. : 223 234599 ou 234646, fax : 230644) contient notamment plusieurs articles sur le patrimoine culturel de Tombouctou et reprend par ailleurs "D'ocres et d'horizons, Djenné !", texte qui a été utilisé au cours de l'année 1996 pour solliciter l'adhésion à DJENNE PATRIMOINE des premiers membres bienfaiteurs.

* African Arts, revue américaine spécialisée, a consacré un numéro spécial (vol 28 n° 4, automne 1995) à la protection du patrimoine culturel du Mali. Le numéro s'ouvre par un article du Président Alpha Oumar KONARE. La suite est en grande partie consacrée à une défense et illustration de la législation américaine de 1993 interdisant pour quatre années l'importation aux Etats-Unis de tout objet archéologique provenant du Delta intérieur du Niger et de la falaise de Bandiagara. Cette publication fournit beaucoup d'éléments de réflexion sur les dimensions et difficultés de la protection du patrimoine archéologique. Elle plaide pour les mérites du modèle américain, où l'organisme le plus efficace dans la conservation du patrimoine culturel est une institution privée, et où n'existe aucune restriction à l'exportation des biens culturels. Elle oppose ce modèle à la politique de la plupart des pays européens (et de quelques autres), qui font plutôt confiance à une réglementation interdisant l'exportation des objets définis comme constituant le patrimoine culturel national ; elle relève que les pays européens les plus amateurs d'objets d'art sont ceux qui s'opposent le plus fermement à une législation restreignant les importations en provenance des pays non européens. Or il semble bien que les avis sur l'efficacité de la mesure prise par les autorités américianes soient généralement plutôt réservés. DJENNE PATRIMOINE envisage de préparer, à l'intention de ses membres, un court document de synthèse sur ces questions.

ACTIVITES DE DJENNE PATRIMOINE

Une assemblée générale de DJENNE PATRIMOINE a été réunie le 21 novembre, pour préparer la contribution de l'association à l'exposition "Djenné, ville du patrimoine mondial", dont l'inauguration était alors prévue pour le 20 décembre. En réalité, une grande partie de la réunion a été consacrée aux questions qu'ont posées les membres de l'association sur l'opération de restauration des maisons de style architectural djennenké.

Ceci montre que cette opération n'a pas encore fait l'objet d'une information suffisante de la part de ses promoteurs.

La modification de la date de l'inauguration de cette exposition (ramenée au 16 décembre) a fait que la contribution de DJENNE PATRIMOINE a été très modeste. Elle a seulement permis que soit exposés la médaille du chef de village (le jour de l'inauguration), un tarikh (pendant la première semaine), un ngoni (instrument de musique à cordes), une baignoire en terre cuite, une porte du style de Tombouctou, et que soient présents dans la cour de la Maison des Hôtes un bijoutier (le jour de l'inauguration) et un brodeur. Alors qu'il avait été prévu de présenter pour la première fois une partie du travail réalisé sur les photos de la collection IFAN/CAD, cela n'a pas été possible en fin de compte. Comme d'autres objets avaient été préparés, ils pourront être exposés à une prochaine occasion.

* Cependant, DJENNE PATRIMOINE a organisé le 16 décembre 1996, à l'occasion de l'inauguration de cette exposition, un premier concours de coiffures traditionnelles. Là encore, la modification de la date de cette inauguration a donné à ce concours un caractère d'improvisation hâtive qui n'a pas permis d'entreprendre, comme c'était l'objectif, l'inventaire des coiffures des divers groupes ethniques et des diverses circonstances. Mais cette expérience pourra être reprise dans quelques mois en tenant compte des enseignements de ce premier essai pour tout ce qui concerne la préparation, l'organisation matérielle et l'animation de la manifestation.

* Amadou Tahirou Ba a continué la rédaction de notices sur les photos de la collection IFAN/CAD : une première version de ce travail, sous le titre "Djenné, il y a cinquante ans" a été photocopiée pour recueillir les commentaires de l'IFAN/CAD ; elle est en cours de révision et d'achèvement.

* DJENNE PATRIMOINE a poursuivi l'inventaire des gisements de documents photographiques concernant la ville, ses habitants, ses maisons, les métiers, etc. C'est ainsi que cent cinquante clichés ont été identifiés au Musée de l'Homme, qui a accepté d'en fournir des reproductions. De même, de splendides photographies prises au début des années 1960 à Kouakourou et à Kolenze par Herta Haselberger, anthropologue autrichienne, ont été repérées ; une demande de reproductions a été adressée au Musée de Vienne. En outre, le fonds Dubois, conservé par les Archives départementales des Deux-Sèvres, a été exploité. Par ailleurs, une centaine de documents photographiques divers ont été repérés dans les boites du Centre des Archives d'Outre-mer à Aix-en-Provence. Enfin, le Musée des Cultures (anciennement Musée d'ethnographie) de Bâle a mis à la disposition de DJENNE PATRIMOINE la reproduction par photocopie laser de la totalité de sa collection de cartes postales anciennes concernant le Mali.

* L'appel à propositions lancé par DJENNE-PATRIMOINE pour utiliser le financement mis à sa disposition par le Musée BARBIER-MUELLER de Genève afin de réaliser une campagne de fouilles archéologiques scientifiques qui pourrait éventuellement fournir le noyau de la collection du futur musée de Djenné, a été lancé en septembre, et les propositions sont attendues pour la fin janvier.

* DJENNE PATRIMOINE est associé à la préparation d'un ouvrage destiné aux touristes cultivés visitant Djenné. Le plan provisoire en est le suivant:

- L'origine de Djenné d'après les découvertes archéologiques

- L'histoire de Djenné dans les traditions écrites et orales

- Djenné il y a cinquante ans (d'après la collection de photographies de l'IFAN-CAD, Dakar, et les commentaires des vieux, travail en cours de Amadoun Tahirou Bah)

- L'enseignement islamique à Djenné

- Portraits de femmes de Djenné

- L'architecture de Djenné

- Métiers d'art de Djenné

- Une enfance à Djenné (à partir de témoignages de personnes éduquées à Djenné)

- Visiter Djenné

- Environs immédiats de Djenné et Pondo

- Un "code de conduite" pour les visiteurs de Djenné

____________________

Ont participé à la rédaction de ce numéro : Amadou Tahirou Bah, Joseph Brunet-Jailly, Papa Moussa Cisse, Bamoye Guitteye, Boubacar Koïta dit Tapo, Ibrahim Kone.

Table des matières Bulletin

Précedent/ Suivant